Sexisme, harcèlement moral et sexuel, discriminations, violences, burn-out… Tous les risques psycho-sociaux sont représentés dans cette série Netflix. Forcément, quand on s’embarque dans le braquage du siècle avec une bande de malfrats, il faut s’attendre à quelques dérapages. Mais étonnamment, l’équipe du professeur gère plutôt bien ces risques et les entreprises devraient s’en inspirer[1] !

Pour ceux qui ne regardent pas la série, Casa de Papel est l’histoire du meilleur braquage de tous les temps. Le professeur, leader et cerveau de l’équipe, recrute huit malfaiteurs, les meilleurs chacun dans leur domaine, pour s’infiltrer dans la Fabrique de monnaie nationale d’Espagne. Leur but : imprimer leurs propres billets (la bagatelle d’1 milliard d’euros), puis s’enfuir sans faire de victimes.

 

Une délimitation claire de la frontière pro/perso

Initialement, les braqueurs ne se connaissent pas et portent des noms de ville pour éviter tout mélange pro/perso. Force est de constater que l’équipe ne respecte pas totalement à la lettre ces consignes (Tokyo couche avec Rio,  le professeur couche avec Lisbonne, Denver couche avec une otage, Moscou est le père de Denver…). Mais on peut au moins rendre hommage au professeur d’avoir défini ces lignes (même s’il les transgresse ensuite allégrement mais au moins il le reconnaît devant ses équipes).

Trop d’organisations ont du mal à tracer cette ligne claire entre vie professionnelle et personnelle. Dans un univers branché « Silicon Valley » c’est même une volonté affichée et pensée de les mélanger allègrement, que l’on se sente au travail comme chez soi. Dès lors, comment faire une coupure et préserver la vie personnelle des individus ? Comment faire comprendre que certains comportements tout à fait acceptables dans la vie personnelle (ex : les blagues sexuelles) ne le sont pas dans le cadre professionnel ? Comment présenter un manager ni comme un père, ni comme un pote mais tout simplement comme un manager ?

Rappelons au passage que c’est une demande des salariés. 2/3 d’entre eux pensent que leur employeur ne les aide pas à trouver un équilibre vie pro/perso. Trouver cet équilibre, c’est forcément au préalable tracer une frontière.

Ne pas faire l’autruche et nommer les problèmes

 

« Ils sont adultes, c’est leur problème ». Dans son ouvrage sur le harcèlement moral, la psychiatre Marie-France Hirigoyen fait ce constat terrible : quand il y a un problème entre deux personnes, le management à tendance à faire l’autruche, à ne pas regarder les problèmes en face. Et même à évoquer la vie privée des salariés pour ne pas intervenir ! Un comble alors que le rôle du management est justement de gérer les équipes et donc les problèmes qui vont avec.

C’est tout le contraire avec l’équipe du professeur. Bogota fait une remarque déplacée sur le « cul bien moulé » de Nairobi ? Elle le remet immédiatement à sa place : « Je vais te mouler les couilles tu vas voir. Pourquoi tu ris ? Je ris pas moi. Ici, je suis la chef (…) Ne nous manquons pas de respect ».  Berlin abuse d’une otage et de son autorité ? Tokyo lui répond avec un Beretta sur la tempe. Rio est en mélange de burn-out et stress post-traumatique ? Stockholm lui prête une oreille attentive et le soutient.

 

La force incroyable de cette équipe de malfrats aux noms de capitales est de se parler, de nommer les choses, de s’écouter en permanence. Parfois un peu violemment certes, mais au moins ils ont le mérite de le faire.

Accepter le conflit pour résoudre les problèmes

Voilà le problème : l’entreprise a tendance à refuser le conflit. Les organisations ont tendance à les mettre sous le tapis en espérant qu’ils disparaissent comme par magie.

Pour Julien Pélabère, Fondateur de l’Institut de Négociation et de recherche appliquée (Nera), les entreprises gagneraient à accepter les conflits voir à les encourager avec un bon encadrement. Car ils sont indispensables à la vie de l’entreprise pour avancer. Conclusion : pour mieux travailler ensemble, mieux vaut parfois s’engueuler un bon coup.

[1] Cet article est basé sur les 3 premières saisons de la série Casa de Papel. L’auteur ne revendique aucune responsabilité quant à la pertinence de son raisonnement sur la 4ème saison qu’il n’a pas encore visionné.